Forts Beauséjour et Gaspareaux en Acadie

par LeBlanc, Ronnie-Gilles

Fort Beauséjour, Nouveau-Brunswick

En 1713, l’Acadie échappe à la France pour être cédée à l’Angleterre en vertu du traité d’Utrecht. Jusqu’en 1763, alors que la Nouvelle-France passe définitivement aux mains de l’Angleterre, la France va maintes fois tenter de reconquérir l’Acadie perdue. Pendant un demi-siècle, la péninsule acadienne sera donc le théâtre de violents conflits entre ces deux puissances européennes en raison de sa grande valeur stratégique. Aujourd’hui, de nombreux vestiges archéologiques témoignent de cette période mouvementée. Parmi ceux-ci, les sites des forts Beauséjour et Gaspareaux ont été désignés Lieu historique national par le gouvernement fédéral dans les années 1920. La mise en valeur patrimoniale de ces deux places fortes révèle deux facettes d’une même période historique et deux façons de rappeler cet épisode critique du fait français en Amérique.

 

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L’importance stratégique de l’isthme de Chignectou

Fréquentée depuis des millénaires par les populations autochtones, la région de l’isthme de Chignectou a été colonisée par les Européens à partir des années 1670. De temps immémoriaux, les autochtones se servaient des cours d’eau et des lacs de cet isthme pour se déplacer entre les rives du golfe du Saint-Laurent et celles de la baie de Fundy. Une fois les Français établis dans cette région, l’isthme de Chignectou a immédiatement gagné en importance stratégique puisque, outre le fleuve Saint-Jean, il constituait le lien de communication le plus rapide entre les établissements français de la vallée du Saint-Laurent et ceux de l’Acadie. C’est pourquoi les Français vont tenter à quelques reprises de reprendre possession de cette portion du territoire acadien cédé à la Grande-Bretagne en 1713 par le traité d’Utrecht. Les sites patrimoniaux d’importance nationale des forts Beauséjour et Gaspareaux témoignent de ces efforts.

 

La pointe à Beauséjour

Isthme de Chignectou montrant la route entre les forts Beauséjour et Gaspareaux

Assez tôt, la crête de Beauséjour qui s’avance vers le Beaubassin (aujourd’hui le bassin de Cumberland) a été peuplée par des colons venus de l’Acadie et de la Nouvelle-France (NOTE 1). Après 1713, ce territoire intermédiaire entre le centre de l’Acadie passée aux mains des Britanniques (autour de la capitale Port-Royal, en Nouvelle-Écosse actuelle) et les territoires demeurés français de la région atlantique (île du Cap-Breton, île du Prince-Édouard et province du Nouveau-Brunswick actuels) représente une zone mal définie par les traités et donc contestée.

Avec le déclenchement de la guerre de la Succession d’Autriche qui oppose de nouveau les empires français et anglais à partir de 1744, les Français lancent trois expéditions dans le but de reprendre l’Acadie. Les deux premières sont organisées à partir de Louisbourg en 1744 et 1745, et la troisième à partir de Québec en 1746, puisque la ville forteresse de Louisbourg est tombée aux mains des Britanniques et des miliciens de la Nouvelle-Angleterre l’année précédente. Afin de faciliter le transport des troupes et des marchandises, les Français choisissent la région de Beaubassin comme base d’opération pour lancer une attaque contre Port-Royal (aujourd’hui Annapolis Royal). Malgré l’échec de cette tentative, les troupes françaises demeureront dans la région de Beaubassin pour la durée du conflit qui prend fin en 1748. À la fin de cette guerre, ils se retirent temporairement de Beaubassin pour y revenir presque aussitôt, dès 1749, en vue de faire valoir leurs prétentions sur cette portion de l’Acadie. Or, la France et l’Angleterre venaient tout juste de mettre sur pied une commission afin de régler définitivement la question des frontières de l’Acadie qui avait été cédée en 1713 « conformément à ses anciennes limites ».

À l’automne 1749, avant même que cette commission ne siège une première fois, les Français plantent donc leur drapeau à la Pointe-à-Beauséjour et ils y érigent un petit fortin en réclamant tout le territoire situé à l’ouest et au nord de la rivière Mésagouèche. Les autorités coloniales britanniques, considérant que ce territoire leur appartient, réagissent promptement. Dès le printemps 1750, une expédition de représailles est lancée pour déloger les Français de l’isthme de Chignectou. Cette expédition est un échec mais les Britanniques en lancent une seconde à l’automne 1750 et réussissent cette fois à prendre position sur l’emplacement du village de Beaubassin que les Acadiens ont abandonné quelques mois plus tôt, à la demande des Français qui l’ont détruit. Ils y érigeent le fort Lawrence. Les Français répliquent en transformant le fortin de la Pointe-à-Beauséjour en un véritable fort, baptisé Beauséjour, situé sur la rivière Mésagouèche, puis en construisant le fort Gaspareaux (NOTE 2) à l’embouchure de la rivière du même nom, dans la Baie-Verte. Le premier sert de principale place forte de la région, le second de centre de ravitaillement.

 

Le fort Beauséjour

Maquette du fort Beauséjour

En 1751, la construction du Fort Beauséjour avait été confiée au lieutenant Joseph Gaspard de Léry. Il s’agit du premier exemple d’un fort de forme pentagonale à cinq bastions en Amérique du Nord, un modèle de fortification dessiné par le célèbre architecte militaire français Sébastien Le Prestre de Vauban. Durant quatre ans, les Français y maintiendront une petite garnison jusqu’à ce que les Britanniques passent à l’attaque en juin 1755.

En ce début d’été 1755, il restait encore beaucoup de travail à faire pour offrir une forte résistance aux assaillants britanniques. L’ingénieur responsable des fortifications, Jacau de Fiedmont, jeta plus tard le blâme sur l’abbé Jean-Louis Le Loutre qui, selon lui, avait préféré confier aux Acadiens la construction d’aboiteaux dans l’isthme de Chignectou, grâce auxquels les familles de réfugiés acadiens de Beaubassin pourraient s’établir en permanence en territoire français. Le Loutre avait obtenu une importante subvention de Versailles pour financer ces travaux (NOTE 3).

Même si les autorités coloniales françaises comptaient beaucoup sur les réfugiés acadiens pour repousser une éventuelle attaque britannique, puisque le fort n’était gardé que par 120 soldats, on doutait que les quelque 694 Acadiens de la région en état de porter les armes (réfugiés et non réfugiés) puissent vraiment participer aux combats puisque la majorité d’entre eux demeurait dans la région des rivières Memramcook, Petcoudiac et Chipoudie, trop éloignée pour assister efficacement la garnison en cas de siège. Ces réfugiés acadiens se trouvèrent d’ailleurs dans une situation fort délicate en 1755, eux qui désiraient avant tout retourner sur les terres que les Français les avaient contraints d’abandonner en 1750, puisque les autorités britanniques menaçaient de faire pendre tout Acadien qui combattrait aux côtés des Français.

 

L’attaque britannique

Plaque expliquant les événements de 1755 au fort Beauséjour, qui devint fort Cumberland

Le 2 juin 1755, près de 2 000 miliciens de la Nouvelle-Angleterre et 300 soldats des troupes régulières britanniques, sous le commandement de Robert Monckton, entament le siège du fort Beauséjour. Ils installent leur camp retranché à environ deux kilomètres, puis, malgré le feu nourri des canons français, ils installent leur batterie à la Butte-à-Charles, à un demi-kilomètre du fort. Des mortiers de 8 pouces entrent d’abord en action, puis, à compter  15 juin, un puissant mortier de 13 pouces.

Pendant ce temps, à la demande du commandant français de Vergor, quelques renforts français arrivent de l’Île-Saint-Jean (île du Prince-Édouard actuelle), ainsi que des Acadiens, réfugiés et non-réfugiés, qui combattent dans le fort assiégé. Sauf que plusieurs d’entre eux choisissent bientôt de retourner à Baie-Verte et à Aulac, craignant les représailles des Britanniques, de sorte qu’il ne reste plus que 220 Acadiens pour appuyer les troupes françaises. Le 14 juin, la garnison de Louisbourg fait savoir qu’il lui sera impossible de porter secours aux assiégés en raison d’un blocus mis en place par les Britanniques. Quatre-vingts Acadiens démoralisés quittent alors l’enceinte du fort, et les autres demandent à de Vergor de se retirer, ne voyant pas la moindre chance de résister à l’attaque britannique. Enfin, au matin du 16 juin, un obus pénètre dans une casemate construite de grosses poutres de bois couvertes de 10 à 12 pieds de terre (environ 4 mètres), tuant quatre de ses occupants. Les Acadiens se soulèvent alors d’un seul corps et demandent à de Vergor de capituler. L’ingénieur de Fiedmont informe le commandant que les autres casemates ne pourront tenir le coup d’un bombardement continu et il est donc résolu de proposer la capitulation. Le 16 juin 1755, en soirée, les Britanniques prennent possession du fort après moins de deux semaines de siège et le rebaptisent fort Cumberland.

 

Suite et fin de la bataille pour l’Acadie

Immédiatement après la prise du fort Beauséjour, le commandant des forces britanniques, Robert Monckton, écrit au commandant de fort Gaspareaux, Benjamin Rouer de Villeray, pour l’informer de la reddition de fort Beauséjour et lui offrir les mêmes conditions de capitulation. Celui-ci accepte et deux jours plus tard, un détachement de 500 soldats britanniques se rend à Gaspareaux pour prendre possession du fort.

Sir Robert Monckton

En vertu des actes de capitulation, les troupes françaises pourront se retirer de ces deux forts avec les honneurs de la guerre et seront transportées à Louisbourg aux frais des Britanniques. Quant aux Acadiens qui ont pris part au combat, un pardon leur est accordé puisque les Français les ont ni plus ni moins contraint de prendre les armes. Les Britanniques désarment aussitôt ces Acadiens et leur font réparer les dommages infligés au fort Beauséjour, qui devient le quartier général des troupes anglaises dans la région. Entre temps, Monckton reçoit l’ordre du lieutenant-gouverneur Charles Lawrence de déporter la population de la région de l’isthme de Chignectou et des trois rivières de Memramcook, Petcoudiac et Chipoudie. C’est ainsi que les Acadiens qui ont pris part à la défense du fort Beauséjour seront victimes de la première vague de la Déportation acadienne en 1755.

Le 11 août 1755, environ 400 hommes acadiens se présentent donc au fort rebaptisé Cumberland où Monckton les a convoqués sous prétexte de les renseigner au sujet de leurs terres. Aussitôt arrivés à l’intérieur de l’enceinte du fort, Monckton les informe que leurs biens seront confisqués par la Couronne et qu’eux-mêmes et leurs familles seront transportés à l’extérieur de la colonie. Comme la plupart de ces hommes sont de la région immédiate du fort, des troupes sont dépêchées dans les établissements les plus éloignés de Tatmagouche, de Baie-Verte, de Tintamarre et des trois rivières de Memramcook, Petcoudiac et Chipoudie afin d’y capturer les hommes et de les conduire au fort Cumberland. En même temps, ces troupes sèment la destruction dans ces différents établissements : à compter de la mi-août à Tatmagouche, suivi au début septembre par Baie-Verte, La Coupe, Aulac, Chipoudie et Petcoudiac où toutefois, les Britanniques sont attaqués et subissent une lourde défaite aux mains des Français et de leurs alliés amérindiens sous le commandement de Charles Deschamps de Boishébert. Ceci atténue quelque peu leur ardeur, mais les Britanniques reprennent leur œuvre de destruction à Tintamarre, à la Pré-des-Bourque (Sackville actuel), à Ouescoque et à Memramcook  en novembre 1755. Au total, quelque 1 014 hommes, femmes et enfants prennent cet automne-là le chemin de l’exil sur un total de 2 900 personnes, soit un peu plus du tiers de la population de l’isthme de Chignectou et des trois rivières de Memramcook, Petcoudiac et Chipoudie (NOTE 4).

Quant au fort Gaspareaux, rebaptisé fort Monckton, les Britanniques l’occupent du mois de juin 1755 jusqu’au mois d’octobre de l’année suivante. Au cours de cette période, ils sont continuellement harcelés par les Français, leurs alliés amérindiens et les résistants acadiens. Au printemps 1756, une autre incursion des Français fait plusieurs victimes, causant une grande consternation dans les rangs des Britanniques qui abandonnent alors le fort Gaspareaux, de même que le fort Lawrence qui est aussi la cible des attaques françaises et de leurs alliés amérindiens et acadiens. Le fort Gaspareaux est complètement vidé, puis incendié, afin que les Français ne puissent s’en servir de nouveau.

 

Protection des vestiges du fort Gaspareaux

Plaque du fort Gaspareaux, 2005

La région de Baie-Verte a connu un certain essor à partir des années 1720. Les paysans acadiens de la région de Beaubassin y conduisaient alors leur bétail et leurs produits agricoles destinés à la ville forteresse de Louisbourg nouvellement construite. Une fois arrivés à Baie-Verte, ce bétail et ces produits agricoles étaient montés à bord de goélettes que des caboteurs acadiens conduisaient à l’île Royale (île du Cap-Breton actuelle), où était situé Louisbourg. Durant les années 1730 et 1740, la région de Baie-Verte fut donc établie et colonisée par des Acadiens de la région de Beaubassin qui y aménagèrent des entrepôts pour recevoir les denrées alimentaires destinées à Louisbourg (NOTE 5). Le fort Gaspareaux y a été construit en 1751 pour protéger de semblables activités de ravitaillement. Après l’incendie du fort, l’emplacement du fort Gaspareaux ne fut plus jamais occupé, autant que l’on sache, sauf pour des activités de pique-nique durant la saison estivale.

Désigné lieu historique du Canada en 1923 par le gouvernement du Canada, ce site a été protégé en vue d’y conserver les ressources culturelles remontant aux occupations militaires française et britannique du milieu du XVIIIe siècle. Aujourd’hui, un monument pyramidale en pierres orné d’une plaque commémorative marque l’emplacement du fort dont le tracé est demeuré presqu’intact. Seule la partie sud-est de la palissade et du fossé a été détruite par l’action de la marée et des tempêtes. Un mur de pierre a donc été érigé devant un mur de béton qui avait été construit préalablement pour assurer la protection du site. En janvier 2010, à la suite d’une tempête particulièrement violente, la mer a exposé la partie du tracé de la palissade qui avait été détruite, mais on a pu constater que la partie nord-est de celle-ci n’avait pas été endommagée, de sorte qu’elle a été conservée presque en totalité, tout comme certains vestiges à l’intérieur de l’enceinte du fort. Ce site présente donc un énorme potentiel archéologique encore inexploité.

 

Mise en valeur du fort Beauséjour

Musée du fort Beauséjour, 2005

Au contraire du fort Gaspareaux que les Britanniques ont incendié en 1756, le fort Beauséjour/Cumberland a été réparé et augmenté. Après 1755, les Britanniques y ont érigé de nouveaux édifices, tels que casernes, magasins, forge, atelier de menuiserie et hôpital. Il a de plus été le théâtre d’une opération militaire en 1776 durant la Guerre d’Indépendance américaine, lorsque des sympathisants à la cause américaine tentèrent de le prendre d’assaut. Par la suite, le fort continua d’héberger une petite garnison et on y construisit même une nouvelle caserne en 1778. Les troupes régulières se retirèrent en 1793 et, par la suite, seule une petite garnison d’entretien resta sur place, sauf à l’occasion de la Guerre de 1812 contre les États-Unis, où des réparations furent effectuées et que des soldats y emménagèrent à nouveau pendant quelque temps. Le fort Beauséjour/Cumberland fut abandonné de façon définitive en 1835 et les édifices et fortification laissés à l’abandon jusqu’aux années 1920.

En 1926, la Commission des lieux et monuments historiques du Canada (CLMHC) désigna le fort Beauséjour/Cumberland lieu d’importance historique nationale sous l’impulsion du docteur John Clarence Webster qui joua un rôle de premier plan dans la désignation et la restauration de ce fort. Le docteur Webster  qui a pris sa retraite en 1919, à l’âge de 57 ans, s’est consacré par la suite à l’histoire du Nouveau-Brunswick, devenant membre de la CLMHC en 1923. Il s’est particulièrement penché sur le dossier des forts Gaspareaux et Beauséjour/Cumberland. C’est aussi à lui que revient le mérite d’avoir ouvert un musée sur l’histoire du fort Beauséjour/Cumberland, juste à l’extérieur de celui-ci, en 1936.

Panneau indiquant le Lieu historique national du fort Beauséjour, 2005

De nouvelles fouilles archéologiques sont menées sur le site de 1962 jusqu’au début des années 1970. On a ainsi pu mettre au jour la poudrière et une casemate de l’époque française, des casernes françaises et britanniques, de même que les vestiges de la palissade en bois de 1751. Des milliers d’artefacts ont également été exhumés, dont plusieurs font aujourd’hui partie de l’exposition muséale. Enfin, grâce à ces fouilles, les visiteurs peuvent maintenant déambuler sur les remparts du fort et observer de plus près les fondations des édifices historiques. Les visiteurs peuvent même participer aux fouilles archéologiques toujours menées sur le site de l’ancien village de Beaubassin en s’inscrivant pour une journée à un programme d’expérience archéologique publique. Enfin, afin de faire revivre l’important passé militaire du fort, des animations s’adressant aux adultes et aux enfants recréent la vie de camp d’un soldat du XVIIIe siècle pendant la saison estivale.

 

Deux approches, un même patrimoine

Canon au fort Beauséjour, N.B.

De nos jours, bien que les forts Beauséjour/Cumberland et Gaspareaux aient tous deux été désignés Lieu historique national dans les années 1920, ils témoignent de façon très différente de la même période critique de l’histoire du Canada. À cette époque, les conflits armés entre les deux grandes puissances européennes se disputant le contrôle de l’isthme de Chignectou ont mené à la Déportation des Acadiens et, ultimement, à la perte des principaux territoires français en Amérique du Nord. Les vestiges du fort Gaspareaux, signalés par une plaque commémorative, ne jouissent que d’une protection physique et légale en vue d’une possible exploitation future. Alors que le fort Beauséjour/Cumberland, historiquement le plus important des deux, a été restauré et bénéficie depuis plusieurs années d’un programme d’interprétation et d’animation complet destiné à un public de tous âges, en plus d’une institution muséale dont le mandat est de faire connaître son histoire.

 

Ronnie-Gilles LeBlanc
Historien, Parcs Canada

 

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Notes

1. Un de ces colons, Laurent Godin dit Châtillon dit Beauséjour est né à Montréal en 1655. Alors qu’il était assez jeune, ses parents s’établirent à Port-Royal en Acadie et c’est là que Laurent épousa une Acadienne, Anne Guérin, vers 1677. Après avoir passé quelques années à Port-Royal, Laurent et Anne s’établirent à Beaubassin avec leur jeune famille, à un endroit qui sera connue comme « la pointe à Beauséjour » en raison du sobriquet de Laurent Godin.

2. Le nom du fort vient de celui de la rivière Gaspareaux nommée ainsi en raison de l’abondance apparente de l’alose, désignée sous le nom de Gaspareaux par les Micmacs et déformé ou francisé sous sa forme actuelle, quoique prononcé « caspareau » par les Acadiens.

3. Voici ce que le commandant de fort Beauséjour, Louis DuPont Duchambon de Vergor, écrivait au sujet du fort, à l’automne 1754, quelques mois seulement avant le siège des Britanniques :

« […] La garnison est de cent vingt hommes de troupes de Quebec et de Louisbourg. L’artillerie de 21 canons de differents calibres et d’un mortier. La garnison n’est pas assez forte pour deffendre ce fort en cas d’attaque ou de siége; il y faudroit au moins 300 hommes.

[…] Les Courtines me paroissent foibles pour résister au canon et l’Intérieur de la place est(?) de beaucoup trop petit. Les batiments de bois et les cheminées de terre appuyées sur des quenoüilles de bois, nous exposent tous les Jours à être Incendiés, accident d’autant plus a craindre qu’il ne seroit pas possible d’y rémédier. Il seroit absolument nécessaire que les cheminées fussent de briques.

La porte de ce fort est commendée par une Eminence qui donne directement dédans(?). Je feray changer ce printems, et M. le Marquis Duquesne a qui J’ay fait cette représentation m’a ordonné de faire ce changement.

L’Eau du puit qui vient d’être achevé est bourbeuse, Epaisse, malsaine et en très petite quantité; il faut pour l’usage de cette place l’aller chercher au déhors et assez loing.

Le Niveau de la place est d’Environ deux(?) pieds plus élevé que les batiments, ce qui cause de l’humidité et dans les cazernes et dans le logement des officiers.

La Boulangerie, l’hopital et les magazins sont hors du fort. Il seroit a souhaiter qu’ils y fussent enfermés, surtout les magazins et la Boulangerie.

Tous les Batiments en général sont en très mauvais etat, les marchandises et effets du Roy ne sont point a l’abry, n’y des avariës, n’y du vol. »

4. Dans les mois qui suivirent, d’autres Acadiens et Acadiennes furent capturés par les Britanniques et emprisonnés à Fort Cumberland. Un plus grand nombre encore rendit les armes et fit soumission aux autorités britanniques à Fort Cumberland à partir de l’automne 1759 (après la chute de Louisbourg et celle de Québec). À l’été 1763, il s’y trouvait pas moins de 70 ménages acadiens totalisant 370 personnes. L’année suivante, ces familles retrouvèrent leur liberté et s’établirent éventuellement à Miquelon, en Louisiane, et principalement au Nouveau-Brunswick actuel dans la région de Memramcook d’où leurs descendants émigrèrent et fondèrent la plupart des établissements acadiens actuels du sud-est de cette province.

5. De Baie-Verte on pouvait passer assez rapidement à l’Île-Saint-Jean qui était également établie et colonisée, à la même époque, par des Acadiens de Beaubassin et des pêcheurs normands et français.

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